– Wander in the district of Pissevin, Nîmes –

[French] –

Situé en périphérie de Nîmes – la fameuse ville romaine – dans le sud de la France, Pissevin est un quartier ayant vu (comme beaucoup d’endroits en France), une large construction de hautes tours dans les années 60. Ces logements HLM ont été construits sur “des terres où le vin coulait à flot, d’où le nom Pis à Vin” d’après un habitant… Comment les Romulus et Remus modernes voient ces tours, ‘Grand Ensemble’ ? Ces derniers veillissent, se détériorent et une violence peut être observée, où notamment des fusillades (dûes  à des trafiques de drogues) se sont déroulées, plus d’une fois en 2019-2020. Dû à un fort taux de chômage dans la région, ce quartier est l’un des quartiers populaires les plus pauvres (et violents) de France. Cependant, un sens de communauté, d’entraide, de solidarité et de débrouillardise peut être constaté et ressenti. En discutant avec les habitants, la plupart déclarent être heureux d’y habiter, connaissant bien leurs voisins, marchant et appréciant pratiquer différents sports dans et autour du principal stade. Nous les avons recontrés au local de l’association AMAOS, lieu de rencontre des jeunes, notamment après l’école et à la maison de projet (en charge d’informer les citoyens sur la rénovation urbaine du quartier…).

Ce quartier paraît tout d’abord isolé du centre ville, une ville dans la ville – composée d’environ 12 000 habitants – mais dorénavant le tram-bus le relie au centre-ville. Etant en renouvellement (certains bâtiments vont être/sont démolis – le processus de gentrification a pu être discuté), nous* avons voulu prendre en photo cet endroit et apprendre à travers des ballades comment les jeunes vivent et se déplacent dans ce quartier en transformation : rendant visite à un ami dans tel bâtiment, achetant des friandises dans un autre, pratiquant une activité sportive et allant au collège dans tel endroit, évitant telle et telle place… Ils se sont intéressés à ce travail de mémoire, voulant montrer leurs habitudes, souvenirs, sentiments de ce quartier qui paraît à première vue complètement isolé, parfois intimidant et en même temps abandonné, “livré à notre propre sort” (par la ville, commune) comme a pu l’évoqué une maman à une réunion une fois.

Ici, se trouve un aperçu (en quatre posters) de cette balade que nous avons effectuée avec des citations de jeunes citoyens, adolescents habitant le quartier qui ont également pris ces photos tout en commentant les endroits visités. Quelques clichés/photos d’un quartier désirant se faire connaître pour de bonnes raisons (et non pas pour la violence, les stéréotypes, labels…). Merci pour ces belles balades et échanges !

[English] –

Situated in the suburbs of Nîmes – the famous roman city – in south of France, Pissevin is a district that has seen (as many areas in France) a big construction of high towers in the 60s. These housing estate were built on lands were “wine flowed abundantly, hence the name Pissevin – as Pis à Vin”, “Udder” of Wine according to an inhabitant. Well, how the modern Romulus and Remus see these towers, ‘Grand Ensemble’  ? There are getting old, deteriorated and where violence, shooting (due to drug dealing) happened more than once in 2019-2020. Due to a high unemployment, the district is one of the poorest (and violent) disadvantaged district of France. However, some sense of community, solidarity and resourcefulness can be witnessed, felt and by speaking with the citizens, they claim, most of them, to be happy to live here, knowing well their neighbors, walking and enjoying practicing different sports in and around the main stadium. We met them at the premises of the AMAOS association, a meeting place for young people, especially after school and at the Project House (responsible for informing the citizens about the renewal of the area…).

This district seems first, isolated from the city center, a city within a city – composed by around 12 000 inhabitants – but from now the tram-bus links it to the city center. Starting its renewal (some building are going to be destroyed – we spoke a bit about gentrification too), we* wanted to picture the place and learn through walking how the young citizens move in this transforming area : seeing a friend living in this building, buying some snacks in another building, doing their sport and going to high school in another area, avoiding this and such place… They were interested (during the workshops) in this work of memory showing us their habits, memories, feelings of a place that might at first seems completely isolated sometimes intimidating and at the same time abandoned, “left to their own” (by the local government) as a mother said in a meeting once.

Here a glimpse (in four posters) of the walking that we made with some quotes from the young citizens, teenagers living in the area who took these pictures while commenting on the visited places. Some shots of a district left to be known for the good reasons (and not only for its violence, stereotypes, labels…). Thanks for these walks and wonderful exchanges !

*[French] – Avec l’association “Les Petits Débrouillards” – nous avons présenté ces travaux, avec les cartes réalisées par les jeunes durant les ateliers (via Openstreetmap) à différentes personnes, acteurs travaillant autour de ce quartier, découvrant et partageant leurs vues, perceptions…

*[English] – With the association “Les Petits Débrouillards” – we then delivered these works, and the maps that the young created during the activities (with Openstreetmap) to different stakeholders of this area, then discovering some parts, sharing their views, perceptions…

Feuilletons nos souvenirs…

J’irai là où les poussières me mènent

Un jour pluvieux d’automne. Vous aimez l’automne ? Nous sortons de la voiture avec nos parapluies puis apercevons des hangars, un parking et sous une tente : une file d’attente.
Nous nous trouvons au milieu de feuilles humides et le bruit des cordes, scrutant des visages inconnus, presque souriants malgré le temps gris, nous nous interrogeons sur le lieu.
Dehors, dedans ? Nous ne savons pas.
Nous entrons au restaurant, le temps d’un thé à la verveine, une boisson chaude pour réchauffer nos mains. Nous sourions à ces visages qui au cours de nos conversations, deviennent de plus en plus familiers.
Dedans. Le show se fera à l’intérieur et non dehors comme prévu initialement.
Nous longeons le parking et nous nous dirigeons dans un des hangars, au F.
Des palettes, des structures en bois et en métal décoraient le lieu en une armature fine mais robuste. Nous nous arrêtons devant une ligne, face à nous, un portrait. Le visage d’une femme, âgée, lunettes, cheveux bruns et un sourire éclairant ses yeux de milles feux. A droite, accroupi, se tient le danseur, Yann. En une première révérence, le spectacle commence.
Nous sommes portés dans la danse comme Yann porte cet être cher. Une fois, deux fois… Des va et vient… Comme des feuilles portées par le vent, le portrait est arraché et bercé de part et d’autre. Pour ensuite atterrir à un endroit, à droite. Canada, Afrique, des voyages, des souvenirs, des moments de vie happés, repensés, répétés comme des éléments fragiles que l’on a peur de casser, d’oublier… Nos yeux suivent Yann, avec la même ferveur avec laquelle il se balance sur une traverse puis des palées de stabilité, comme pour arrêter le temps. Où en étions nous ? Nous parlions de voyage, d’anniversaires, de moments partagés, vécus et essayons nous-mêmes de les retenir, restons happés, de peur qu’ils s’enfuient, trop vite. Yann se mêle à la foule, nous interpellant sur comment, comment et où avons-nous pu mettre tel objet ?
Mais qu’est-ce que cet objet ? Comment était-il ? Les mots sont justes, ils sont là, décrivent le décor, des objets, des moments en nous nous interrogeant du regard, mutuellement, chacun. Sommes-nous là ? Là avec nos vêtements, ponctuellement, dans un hangar, un point de localisation facilement identifiable par GPS mais… mais réellement, cet endroit… nous le découvrons. Un premier portrait arraché, puis un autre, celui d’un jeune homme souriant, lui… Le voilà qui se dépose sur le visage de Yann, son corps se mêle au portrait comme un géant émoji. Laissant tomber le portrait au sol, nous découvrons un autre visage, qui semble familier mais beaucoup plus jeune… une femme brune, aux cheveux bruns et ce même sourire. Nous inversons le temps, du moins, nous avançons dans le temps, seulement en sens inverse. Ce passé futur se déroule sous nos yeux, bercé par la voix douce de cette femme âgée, rencontrée auparavant. Elle chantonne. Elle resplendit. Des miettes, des miettes, un tas de miettes, se sont des éléments (fictivement) posés par cette dame dont le prénom nous reste inconnue. Sont-ils réellement fictifs ou sont-ils évoqués comme ces mêmes miettes qui nourrissent les fourmis. Nourrissant notre réflexion, nos pensées, nous continuons à regarder tour à tour Yann, puis l’audience, en regards amusés et curieux. Nous nous interrogeons… Quelles sortes de miettes ? Des avalanches de miettes ? De poussières ? De souvenirs ? Les portraits se déchirent en morceaux… Yann nous propose généreusement de prendre un morceau, un seul. A garder précieusement.

Plus de portraits mais un seul miroir brisé et un voile miroitant, tourbillonnant qui se pose sur une spectatrice comme une fine goutte se poserait sur une feuille. Le temps d’une valse. Une histoire écrite, vécue, partagée, bercée par une voix légère qui semble être heureuse, fredonnant, se demandant c’est quoi le bonheur… Le bonheur ! Le Bon-heur ?! La Bonne heure ? Le voile blanc disparaît au loin, comme une mariée se dirigeant vers l’autel. Qu’y-a-t-il au bout ? Personne ne le sait, puisque lui seul, accompagnée par la voix de cet être cher sortent du hangar, en un au revoir où même le miroir ne put réfléchir ce moment. Hors cadre, hors sol, hors de vue, ‘hors sujet’ comme Yann a pu l’évoquer durant la prestation. Interrogés ? Est-ce la fin ? Déjà ? Quelle heure est-il ? Sommes-nous devenus hors sujets, hors du temps ? Il est temps de partir mais nous repartons avec des morceaux de souvenirs, de prestations, d’interrogations et surtout d’émotions. Merci.

*A tous nos êtres chers et personnes rencontrées : vous nous avez peut-être oubliés, déjà, mais nous ne vous oublions pas. Nous vous portons avec nous où que nous allions.

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[English] –

I’ll go where the dust takes me

A rainy fall day. Do you like fall season? We get out of the car with our umbrellas, then see hangars, a parking lot and under a tent: a queue.
We find ourselves in the midst of wet leaves, hearing the sound of continuous drops and scrutinizing unknown faces, almost smiling despite the gray weather, we were wondering about the place.
Outside inside ? We do not know.
We enter the restaurant, time for verbena tea, a hot drink warming our hands. We smile at those faces which in the course of our conversations become more and more familiar.
Inside, the show will take place inside, and not outside as originally planned.
We walk along the parking lot and we go to one of the hangars, at F.
Pallets, wooden and metal structures decorated the place in a thin but sturdy frame. We stop in front of a line, in front of us, a portrait. The face of an elderly woman, glasses, brown hair and a smile that brightens her eyes. On the right, crouching, stands the dancer, Yann. By one reverence, the show begins.
We are carried in the dance like Yann carries this loved one. Once, twice… Coming and going… Like leaves blown by the wind, the portrait is ripped from the wall and rocked on both sides. Then landing in a place, on the right. Canada, Africa, travels, souvenirs, moments of life snatched up, rethought, repeated like fragile elements that we are afraid of breaking, of forgetting… Our eyes follow Yann, with the same fervor with which he swings on a cross bar then on balances of stability, as a way to stop time. Where were we ? We were talking about travels, birthdays, moments shared, lived and we ourselves try to hold them back, drawn, fearing they might escape, too quickly. Yann mingles with the crowd, questioning us on how, how and where we we put such and such object ?
But what is this object? How was it ? The words are right, they are there, describing the scenery, objects, moments and we were looking at each other, each. Are we there, there with our clothes, occasionally in a shed, a localized point easily identifiable by GPS but… but really, this place… we discover it. A first portrait torn off, then another, of a smiling young man… Here he is, settling on Yann’s face, his body mingling with the portrait like a giant emoji. Throwing the portrait to the ground, we discover another face, which looks familiar but much younger… a brunette woman, with brown hair and that same smile. We are reversing time, at least we are moving forward in time, only in the opposite direction. This future past unfolds before our eyes and rocked by the soft voice of this elderly woman, met before. She hums. She shines. Crumbs, crumbs, a heap of crumbs, are elements (fictitiously) posed by this lady whose first name remains unknown to us. Are they really fictitious or are they just conjured up as the same crumbs that feed the ants. Feeding our reflection, our thoughts, we continue to look alternately at Yann, then at the audience, with amused and curious looks. We wonder… What kinds of crumbs? Avalanches of crumbs? Dust? Memories? The portraits are torn into pieces… Yann generously offers us to take a piece, just one. To keep preciously.

No more portraits but a single broken mirror and a shimmering, swirling veil that lands on a spectator like a fine drop on a leaf. Time for a waltz. A story written, lived, shared, rocked by a light voice that seems to be happy, humming, wondering what happiness is… Happiness! Happiness ?! The good time ? The white veil vanishes over the horizon, like a bride heading for the altar. What is at the end? Nobody knows, since he, alone, accompanied by the voice of his loved one come out of the hangar, in a goodbye where even the mirror could not reflect this moment. Out of frame, off ground, out of sight, ‘off topic’ as Yann spoke of during the performance. Wondering ? Is this the end ? Already ? What time is it ?
Have we become irrelevant, timeless? It’s time to go but we leave with pieces of memories, performances, questions and above all emotions. Thank you.

* To all our dear ones and people we have met : you may have forgotten us already, but we are not forgetting you. We carry you with us wherever we go.